Relever le défi du numérique par la formation
L’utilisation du digital induit de nouvelles compétences et donc de la formation. Notamment pour les professionnels de demain. Comme le décrit Meriem Fournier, directrice d’AgroParisTech-Nancy :
« L’ingénieur n’ira pas souvent travailler tout seul avec sa boîte à outils au fond des bois. Il s’agit de travailler en réseau et de mettre en pratique l’intelligence collective. »
Et d’avancer l’idée d’un MOOC, soit un cours en ligne ouvert à tous. De leur côté, Fransylva et le Centre national de la propriété forestière (CNPF) ont récemment lancé un kit pédagogique en ligne sur la gestion forestière.
La formation aux outils numériques est aussi un enjeu identifié pour les scieries ; Nicolas Douzain, délégué général de la Fédération nationale du bois (FNB) considère le numérique comme « le deuxième défi à relever après les bâtiments de grande hauteur en bois ».
Idem dans la construction bois. Ce que souligne Pierre Chomette, architecte membre d’ADIVbois, association pour le développement des immeubles à vivre en bois :
« La maquette numérique du bâtiment ou BIM ne se limite pas à un dessin en 3D. Tous les intervenants viennent gérer cette maquette. Les PME vont avoir une marche à monter. »
Des outils digitaux pour s’approprier la gestion des forêts
À l’usage, les outils digitaux ont de quoi séduire les propriétaires forestiers, estime Sylvie Coisne, vice-présidente de Fransylva :
« Les documents de gestion durable des forêts vont être enregistrés et numérisés. Le site Web “La forêt bouge” s’ouvre dès janvier 2018, élaboré par le CNPF. Les propriétaires pourront situer leur propriété cartographiée et ce qui s’ensuit. Ces nouveaux outils viennent en plus de la balade nécessaire et permanente en forêt. Ils peuvent contribuer à ce que les propriétaires s’impliquent et deviennent de plus en plus gestionnaires et producteurs. »
La plateforme laforetbouge.fr se présente comme un outil informatique destiné à « faire progresser la mobilisation des bois en forêt privée en proposant des services innovants ». Elle a pour optique de « rassembler des outils, qui existent déjà sur Internet, dans un même espace ».
Pour la gestion des forêts, les progiciels ont fait leur entrée chez les coopératives « il y a 15 ans », selon Julien Bluteau, secrétaire général de l’union de la coopération forestière UCFF. Ils s’accompagnent de cartographies numérisées et vectorisées, de données collectées sur le terrain, géolocalisées et synchronisées en temps réel avec lesdits progiciels.
Le partage des données : jusqu’où ?
L’Office national des forêts (ONF) projette de vendre du bois sur Internet. Avec des sujets à discussion. Nicolas Douzain, de la FNB, cite « les droits d’accès aux ventes, le partage des informations du résultat des ventes ».
Par ailleurs, le projet eMobois vise à faciliter les échanges de données entre producteurs forestiers et consommateurs et transformateurs du bois. Il est nécessaire d’aller plus loin, selon l’architecte Pierre Chomette :
« Quand une matière grise se dit que l’on va mettre du bois dans un bâtiment, il faudrait que le projet soit connecté aux forêts, afin de prescrire les bonnes quantités de bois. »
Internet pour dialoguer avec la société
Pour les organismes de certification forestière, Internet ressort comme un vecteur de communication envers le grand public, par le biais de vidéos ou des réseaux sociaux. Ceci afin de « toucher les consommateurs finaux qui achètent des produits bois », souligne Paul-Emmanuel Huet, directeur exécutif de PEFC France. Aurélien Sautière, directeur exécutif de FSC France, ne dit pas autre chose : « Il faut que les jeunes comprennent ce qu’est une forêt ; à cet égard, les réseaux sociaux sont des outils de dialogue. »
Meriem Fournier, d’AgroParisTech, invite à « diffuser, auprès de notre société de la spontanéité et du “tout, tout de suite”, les valeurs forestières d’engagement sur le long terme, de gestion de la complexité, de manipulation sobre du milieu pour un tirer un maximum ».
Enfin, Cyril Le Picard, président de l’interprofession France Bois Forêt, voit dans Forestopic « un outil numérique pouvant s’adresser aux professionnels de la forêt et du bois, ainsi qu’au public ».
Multiforme, le numérique est donc aussi transversal. Un autre virage technologique en cours est celui de la robotique** dans les industries du bois.
Chrystelle Carroy/Forestopic
* Évènement Forestopic organisé avec le soutien de France Bois Forêt, Fransylva, l’UCFF, la FNB, FSC France, PEFC France, AgroParisTech.
** Selon le rapport Plan recherche & innovation 2025. Filière forêt-bois.